Le projet Cigéo de stockage en couche géologique profonde de déchets radioactifs comprend une « Phase industrielle pilote » (Phipil) dont l’objet est de vérifier le bon fonctionnement de l’ensemble des installations et de tester la réversibilité du stockage par des essais sur un petit nombre de colis de déchets. Ce rapport présente la Phipil et analyse les problèmes qu’elle pose.

La Phipil n’a été introduite que tardivement l’élaboration, du projet Cigéo à la suite du débat public de la Commission nationale du débat public (CNDP) de 2013, alors que la proposition de réaliser un « prototype » avait été faite au cours du débat de 2006, notamment par Global Chance.
C’est ainsi que la Phipil est inscrite dans le Code de l’environnement, article L542-10-1 dans sa version en vigueur depuis le 27 juillet 2016 qui met l’accent sur la réversibilité et la récupérabilité du stockage, à un moment où le projet était déjà très avancé.

Cette introduction relativement récente dans l’élaboration du projet se ressent dans les dossiers de la Déclaration d’utilité publique (DUP) et dans celui de la Demande d’autorisation de construction (DAC) dans lesquels on constate que certains textes ont été manifestement écrits avant l’introduction de la Phipil dans le déroulement du projet, ou bien, en particulier dans les schémas le concernant. Lectures difficiles donc, le sujet de la Phipil étant traité dans plusieurs pièces des dossiers, pas forcément de façon cohérente entre elles.

Trois questions principales se posent sur la Phipil

Premièrement, le petit nombre de colis prévus pour ces expériences est-il représentatif de l’ensemble des déchets ? Certainement pas car un seul type de déchets MA-VL serait étudié et que, pour les déchets HA, ce ne sont que quelques déchets de faible activité (HA0) et de faible énergie thermique qui seraient testés. La Phipil du dossier de la DAC est loin d’être le « prototype » qui eut été nécessaire et les enseignements qu’elle pourrait apporter seraient très limités.

Deuxièmement, pour ce qui concerne les déchets HA, « les vrais », il n’est prévu de las charger qu’à l’horizon 2080, avec une installation nucléaire de surface EP2 qui n’est qu’évoquée dans les différentes Pièces de la DAC. Ce qui confirme le sentiment que l’autorisation de mise en service à l’issue de la DAC ne portera guère que sur la Phipil et en aucune façon sur l’ensemble du projet.

Troisièmement, et cela constitue un choix fondamental, l’ANDRA demande que, à la fin de la Phipil dont la date serait décidée par elle-même, les déchets HA soient récupérés en surface mais, par contre, les déchets MA-VL seraient maintenus au fond en tant que début du stockage.
En outre, l’ANDRA demande que la construction des installations souterraines et le chargement des colis MA-VL soient poursuivis sans attendre la décision du Parlement de poursuivre ou non le déroulement du projet, à la suite de l’instruction des enseignements de la Phipil.
Cette décision pourrait en effet conduire soit à l’arrêt du projet, soit à l’acceptation du projet sans modifications, soit à sa poursuite moyennant des modifications de conception ou de réalisation à la suite de l’instruction par l’Autorité de sûreté (ASN) et de la remise de son rapport au Parlement.

Ce troisième point est crucial : la logique industrielle comme la sûreté des installations et la protection des travailleurs et des populations imposent au contraire que la construction et l’exploitation du site soient interrompues à la fin de la Phipil et jusqu’à la décision du Parlement.

Cette question doit être impérativement tranchée pendant l’instruction de la DAC.

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